DÉCOR DE THÉÂTRE

DÉCOR DE THÉÂTRE
DÉCOR DE THÉÂTRE

DÉCOR DE THÉÂTRE

Partie essentielle de la composition scénique, le décor est au centre de l’extraordinaire évolution de la mise en scène contemporaine. Élément fondamental de la scénographie, le décor définit un espace, soit en limitant l’action, soit en s’intégrant à elle. Longtemps témoin de la représentation de l’action, le décor tend à devenir de moins en moins décoratif, de plus en plus représentatif du lieu scénique lui-même, donc de l’action. Au début du siècle, Edward Gordon Craig et Adolphe Appia proposent de remplacer les décors en toile peinte par des volumes dont les lignes créent le rythme visuel de l’espace dramatique. Jacques Copeau, très influencé par ces théories, a remis en honneur le tréteau nu. Après la Première Guerre mondiale, deux écoles importantes se développent en Europe. En Allemagne, celle de l’expressionnisme, avec des metteurs en scène comme Reinhardt, Piscator; en U.R.S.S., le constructivisme avec Meyerhold, Evreinov... L’attention portée au décor concourt à la réalisation d’un théâtre de vastes espaces, bousculant la disposition scénique à l’italienne. Le théâtre français du Cartel connaît peu ce lyrisme scénique, encore que Baty et Pitoëff ne partagent pas la rigueur dogmatique de Jouvet et de Dullin, très attachés au texte. Jean-Louis Barrault s’inspire de l’expressionnisme baroque par l’intermédiaire d’Artaud et des peintres marqués par le surréalisme (Masson, Labisse). Jean Vilar trouve une tout autre place pour le décor. Sur les vastes espaces d’Avignon ou du palais de Chaillot à Paris, le dispositif scénique a recours aux seuls éléments indispensables pour situer l’action. Les éclairages jouent le premier rôle, et le dépouillement est de règle. Le grand espace crée son propre décor, où apparaissent les costumes dus au peintre Gischia. Cette réaction était salutaire: trop souvent, la réalisation scénique n’était que la présentation d’un décor et de costumes, sans souci de la signification de l’œuvre. À partir de 1950, le théâtre d’avant-garde prête peu d’attention au décor; il est vrai que ses metteurs en scène officient dans des salles pauvres et petites. Mais bientôt on connaîtra un Ionesco montrant ses personnages dans des décors somptueux aux nombreuses machines (Rhinocéros , 1960; La Soif et la Faim , 1966). Jean Genet, de son côté, allie le texte aux nécessités des objets et du décor. André Acquart fait le décor des Nègres en 1959 et celui des Paravents , en 1966. Déjà, les décorateurs français sont très influencés par le réalisme brechtien (André Acquart, René Allio). Le décor stylisé porte une part de la signification de l’univers scénique et des objets réels dans un espace dramatique. Cette reconnaissance du théâtre en tant que tel ne peut se passer du décor pour ceux qui, poussant aux extrêmes la revendication de l’acte réel et non plus la représentation d’une action, considèrent que seul le lieu lui-même existe, partagé entre acteurs et spectateurs dans une même attente. Plus qu’une négation, c’est une intégration absolue au bénéfice provisoire de l’acteur.

À partir de la fin des années 1960, d’ailleurs, ce désir de «nudité» exemplaire commence d’être battu en brèche. L’importance croissante du metteur en scène l’amène à s’associer étroitement à des décorateurs susceptibles de donner forme à sa vision de l’œuvre. De nouveaux styles naissent: à la suite de L. Damiani, Ezio Frigerio imagine, pour Giorgio Strehler notamment, un univers riche de références picturales (La Trilogie de la villégiature , 1978; L’Illusion comique , 1985; pour l’opéra Simon Boccanegra , 1971; Les Noces de Figaro , 1973), tandis que les constructions monumentales de Richard Peduzzi sont inséparables de l’univers de Patrice Chéreau (La Dispute , 1973; Peer Gynt , 1981, et pour l’opéra L’Anneau du Nibelung , 1976; Lulu , 1979). Mentionnons également le travail opéré auprès de Klaus Michael Grüber par les peintres Gilles Aillaud (Faust Salpêtrière , 1975; Bérénice , 1984; La Medesima Strada , 1988; Sur la grand-route , 1984) et Eduardo Arroyo (La Walkyrie , 1976; La Cenerentola , 1986), et soulignons qu’une telle diversité, une telle emphase parfois n’auraient pas été possibles sans le va-et-vient entre théâtre et opéra accompli par beaucoup de metteurs en scène durant cette période.

Encyclopédie Universelle. 2012.

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